Portrait
Le portrait de la semaine Jean Mornet/
Sport toujours !
Depuis plusieurs semaines et l’incendie qui a ravagé le gymnase de l’Avant-Garde, des employés d’une société de nettoyage sont à pied d’œuvre. Ils n’ont pas intérêt à chômer. Jean Mornet, président de l’association, contrôle l’avancée des opérations tous les jours. Même à 90 ans, il ne transige pas avec le travail.
Une exigence que ce Dionysien pur jus – né à deux pas de la basilique – tire aussi bien de son solide parcours d’entrepreneur que des valeurs familiales. « Mon père habitait dans les Deux-Sèvres, à Tillou. Ses parents avaient une ferme de 32 hectares avec une dizaine de vaches. Après la guerre, en 1919, il est monté à Saint-Denis où il avait un beau-frère, imprimeur sur tissu près de Gouvieux (Oise). » Il intègre lui aussi une imprimerie textile. « Il a appris le métier, changé plusieurs fois d’entreprise, avant de devenir ouvrier puis contremaître. Et un beau jour il a décidé avec un autre de s’installer lui-même comme imprimeur sur tissu au 12 boulevard Félix-Faure », raconte Jean Mornet « très fier » de son paternel. « Un modèle » dès ses plus jeunes années.
Champion de France de gymnastique
Jean avait cependant à peine 10 ans lorsqu’il a dû s’exiler chez un oncle fermier dans les Deux-Sèvres de 1939 à 1943. Il était le seul de sa famille à ne pas posséder de masque à gaz.
« Quand je suis revenu à Saint-Denis en 1943, j’ai repris la gymnastique que j’avais commencée à 8 ans au patronage de la basilique avec l’Avant-Garde de Saint-Denis où ils proposaient des activités sportives. Il y avait une salle rue Ternois [voie dionysienne disparue depuis]. Je n’étais pas mauvais, j’étais très souple. Il me manquait un peu de force mais ça allait ! », se rappelle l’ancien athlète toujours alerte.
À 18 ans, en 1947, il remporta en effet le premier championnat de France de la Fédération sportive et culturelle à Laval (Mayenne) avec l’Avant-Garde. Jean Mornet était alors le cadet de l’équipe : « C’est moi qui ai rapporté le moins de points. Mais sur 6000 points, on a gagné avec 2 points d’avance. Donc j’ai compté aussi ! » Le Dionysien a poursuivi la gym jusqu’à ses 27 ans en intégrant même l’équipe fédérale qui s’est rendue aux Pays-Bas et en Allemagne. Faute de revenus pendant ces compétitions, il a fini par y renoncer. D’autant que son premier défi professionnel était survenu deux ans plus tôt.
Entrepreneur à succès
La fermeture de la rivière Le Croult, qui desservait l’atelier d’impression et servait à laver le tissu, avait poussé les Mornet à investir dans un atelier à Garges. « Malheureusement, à 59 ans mon père a eu un hématome au cerveau. J’avais 25 ans. Avec mon frère, j’avais la charge de remonter cet atelier », se souvient Jean. En 1967, son cousin germain a l’idée de regrouper son entreprise et la leur pour acheter une machine de 40 mètres : « À l’époque on travaillait manuellement, avec des cadres, des planches. Ça coûtait la moitié de notre chiffre d’affaires, aussi bien à lui qu’à nous. On a ensuite pu faire des prix lorsqu’on a eu une machine, puis plusieurs. On s’est agrandi. On a monté une usine à Gouvieux qui faisait 10000 mètres couverts, 4 hectares de terrain. C’était une réussite. On a aussi monté une affaire de vente de tissus, une autre affaire de teinture. »
Sollicité pour son expérience d’entrepreneur, il revient à l’Avant-Garde en 1975 en tant que vice-président. La belle histoire aurait pu tourner court puisqu’il démissionne temporairement en 1983. « Chaque section tirait la couverture à elle et c’était pénible. Je voulais que ce soit organisé », explique Jean Mornet, qui reprendra l’association en main un peu plus tard. À sa retraite, ses entreprises ont périclité, à l’image de l’industrie du textile : « J’ai arrêté de travailler à 63 ans, et en l’espace de 4-5 ans tout a coulé faute de travail. » Depuis, son unique salaire est « de réussir à faire plaisir » à l’Avant-Garde.
Adrien Verrecchia
Réactions
Christine Julien (Pseudonyme non vérifié)
25 juin 2019
Réagissez à l'article