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Trois ans après l’assaut du raid
/ Ils veulent l’accès à leur immeuble

Trois ans après l’assaut du Raid contre leur immeuble, les propriétaires du 48 rue de la République étaient réunis le 19 novembre pour en réclamer l’accès. Et pour dénoncer une volonté de la ville de les spolier.
Une quinzaine d'anciens habitants du 48 rue de la République a réclamé l'accès à leurs appartements.
Une quinzaine d'anciens habitants du 48 rue de la République a réclamé l'accès à leurs appartements.

A Paris et dans le quartier du Stade de France, on commémorait le 13 novembre la mémoire des 130 morts, victimes du plus terrible des attentats djihadistes jamais commis dans ce pays. Mais au cœur de Saint-Denis, c’est l’immeuble dévasté le 18 novembre par l’assaut du Raid pour en déloger Abaaoud, le chef du commando, qui focalise encore l’attention. Trois ans après, la plupart des sinistrés du 48 rue de la République, soit 30 familles et célibataires, ont obtenu d’être relogés en HLM.

Mais comme le souligne l’association Droit au logement, toujours à leur côté, 3 personnes demeurent encore à l’hôtel et 4 autres sont hebergées en résidence sociale. Restent les propriétaires des 38 logements et 6 commerces qui eux crient à la « spoliation ». Le lundi 19 novembre, ils étaient une quinzaine, accompagnés de leur syndic et de leur avocat, à se rassembler au bas de l’immeuble pour en réclamer l’accès. Et pour dénoncer l’attitude de la ville, dont ils n’ont eu de cesse de contester l’arrêté de péril imminent pris le 1er décembre 2015 sur l’ensemble de la copropriété.

Des citoyens de seconde zone

L’un d’eux, représentant de la SCI  propriétaire du rez-de-chaussée commercial, déclare avoir « des documents comptables à récupérer » pour être indemnisé, comme d’autres l’ont déjà été, par le ministère de la Justice. « Voyez cette dame, qui habitait là depuis trente ans. Elle risque de tout perdre », lance une femme qui se dit elle-même propriétaire occupante. « Les gens qui étaient précaires on les a laissés rentrer, renchérit-elle. Il y a eu plein de vols. » Un autre encore, propriétaire bailleur, s’emporte lui aussi contre « la mairie pour qui on est des marchands de sommeil, des citoyens de seconde zone ». Il en avance pour preuve les appartements, au nombre de cinq, qui ont été rachetés par la ville - en fait par Plaine Commune - auprès de propriétaires occupants, à « 2500 euros le m2 ». Les propriétaires bailleurs étant appelés, quant à eux, à se contenter des « 500 à 1000 euros le m2 » de l’estimation que pourrait en faire la Direction de l’immobilier de l’Etat, ex Domaine, faute d’accord avec la ville.

« On a ouvert l’immeuble après l’assaut, puis en 2016 », rappelle de son côté, David Proult, élu délégué à l’urbanisme et au foncier, qui insiste sur la dangerosité de ces lieux frappés de péril. « S’ils ont d’autres affaires à récupérer, qu’ils en fassent la demande et on s’organisera avec une entreprise de déménagement. » L’élu tient aussi à le rappeler : « C'est un immeuble qui était déjà assez dégradé. Il figurait parmi les immeubles prioritaires pour l’OPAH (opération programmée d’amélioration de l’habitat) de 2011-2015. Et malgré l’accompagnement d’Urbanis (société conseil pour l’habitat), rien n’a été fait. »

Grevée par un déficit de 600 000 euros, la copropriété avait motivé en mai 2015 une procédure d’insalubrité. Aujourd’hui, c’est l’aménageur Soreqa  qui avec le soutien de l’ANRU (Agence nationale de renouvellement urbain) s’apprête à reprendre la main, en vue d’une probable démolition reconstruction.

Marylène Lenfant