En ville

À la rencontre du rêve américain

Ah le fameux « rêve américain » ! En avril dernier, pendant dix jours, onze jeunes Dionysiens, pour beaucoup des élèves du lycée Suger, ont essayé de le toucher du doigt lors de leur voyage à Harlem, dans le cadre d’un échange avec des lycéens de la Douglas Academy.
Après un an de préparation, et un spectacle – Harlem Terminus présenté en février au théâtre de la Belle Étoile – ces jeunes sont presque devenus de vrais New-Yorkais, happés par cette ville globale qui vit vingt-quatre heures sur vingt-quatre, la bien nommée Big Apple. Entre fascination et effroi. Et à New York, ville mythifiée par le cinéma, les images s’entrechoquent dans l’esprit des visiteurs…
Chez ces jeunes Dionysiens, les références s’accumulent : « Quand je regarde à la télé New York 911, ça se passe à Harlem », remarque Yassin. « Sur le pont de Brooklyn, ça me faisait penser au film avec Will Smith, I am legend », note Youssef. Justement, l’idée du voyage « était de travailler avec les élèves sur les clichés. Comparer Harlem et Saint-Denis permettait de les interroger sur les images médiatiques », souligne Aurélie Gigot, leur professeur d’anglais.
Et c’est vrai qu’à Harlem, « c’est pas du tout comme dans les films en fait ! », s’exclame Ouardia. « Quand j’ai dit à ma famille et mes amis que j’y allais, ils avaient un peu peur, pensant qu’il y avait beaucoup de violence. Or, c’est un quartier comme un autre », remarque Myriam. « C’est comme lorsque les médias parlent de Saint-Denis avec plein de clichés… »

« Un rêve différé »
En dix jours, les lycéens ont au contraire découvert Harlem de l’intérieur. Auprès de ses habitants : « On sent vraiment que c’est leur quartier, à eux, mais d’un autre côté on se sentait vraiment chez nous », raconte Youssef. Il faut dire que les jeunes Dionysiens venaient à leur rencontre en leur parlant de grandes figures noires telles que Martin Luther King, James Baldwin, Malcolm X… Au moment même où « le » quartier noir de New York, comme toute l’Amérique, se met à croire en la candidature de Barack Obama.
À Harlem, les lycéens ont eu la chance de rencontrer la photographe Martine Barrat, née en France, et installée dans le quartier depuis longtemps. Elle leur a fait découvrir « Little Senegal ». « Je ne m’attendais pas à entendre parler français à Harlem ! Il y a beaucoup d’immigrés africains en fait, et pas que des afro-américains », s’étonne Yassin. Car New York n’a cessé d’être une ville d’immigration, et représente encore pour beaucoup un véritable Eldorado. Mais à côté des lumières de Time Square ou des quartiers d’affaires – « toute la nuit les bureaux sont allumés ! », s’exclame Yassin – règne la misère, notamment chez les Noirs. De retour en France, les élèves préparent une grande exposition pour les prochains mois, et continuent leur voyage en rencontrant d’autres personnalités, comme l’écrivain Eddy Harris, qui a élu domicile dans l’Hexagone. « C’est quoi le rêve américain ?, se demande ce dernier. Moi j’y mets un gros point d’interrogation. Le rêve, pour qui ? Pour beaucoup, ce n’est qu’un rêve en différé. »
Marc Endeweld